Senso-ji (Tokyo), fidèles en train de prier devant le pavillon bouddhiste

Bien se comporter dans les temples et les sanctuaires

🙏🏻 L'étiquette du culte au Japon

⏱ 12 minutes

Sites sacrés au Japon, les sanctuaires shinto et les temples bouddhistes répondent à un ensemble de pratiques et rituels hautement respectés par la société. Savoir bien se comporter et prier les divinités locales, lorsque l'on est un touriste étranger, permet une meilleure compréhension et une visite respectueuse de ces enceintes religieuses.

Tout voyageur au Japon visite au moins 1 fois lors de son séjour un temple et un sanctuaire. Ces enceintes religieuses, ouvertes à tous et présentes en nombre à travers tout l'archipel, rythment le calendrier annuel et la vie quotidienne des Japonais qui s'y rendent très régulièrement. Voici ci-après, un ensemble de bonnes pratiques à adopter pour bien s'y comporter et profiter ainsi un maximum de la spiritualité et de la beauté de ces lieux, avec quelques différences à saisir entre sanctuaire shinto et temple bouddhiste.

Que l'on soit adulte ou enfant, le calme des visiteurs est requis lorsque l'on visite un site sacré. Parler bruyamment, courir, danser ou sauter restent donc des comportements inappropriés (hormis lors d'évènements festifs encadrés). Certains lieux les plus contemplatifs se réservent le droit ne pas accepter un public trop jeune qui ne pourrait pas se contenir. On évite également de se rendre au sanctuaire lorsque l'on est malade ou en période de deuil.

La tenue vestimentaire n'est en revanche pas soumise à un code particulier mais il convient de ne pas se présenter trop dénudé : pas de maillot de bain, de mini-short, de top à bretelles ou de tee-shirt crop top. L'on peut prévoir une chemise légère pour se couvrir au cours d'une visite en été. En cas de port d'un chapeau ou d'une casquette, il est bien vu de l'enlever à l'intérieur d'un pavillon. La visite du sanctuaire ou du temple en kimono 👘 est par ailleurs une activité prisée des Japonais, en couple et entre amis.

De manière générale, les photos sont autorisées dans toutes les parties extérieures (architecture des pavillons, jardins japonais) et souvent interdites à l'intérieur : les représentations de Bouddha les plus sacrées placées derrière un autel, par exemple, ne peuvent être photographiées sans autorisation préalable. On conseille également d'éviter de prendre en photo, au format portrait, les prêtresses miko qui travaillent dans les sanctuaires ainsi que les moines en séance de prière.

Ise-jingu (Ise), inclination devant la porte Torii avant de pénétrer dans le sanctuaire

⛩️ Pénétrer dans l'enceinte sacrée

Érigé à l'entrée d'un sanctuaire shinto, le haut portique torii ⛩️ en bois de couleur vermillon, en pierre ou béton gris, est spécifique au Japon. Il sépare la zone sacrée de la partie profane. Avant de franchir le seuil de cette porte d'entrée, il est bien vu de s'incliner et de se positionner sur les côtés. En effet, bien qu'il ne soit pas signifié, le passage au centre du torii est réservé aux divinités et aux prêtres au cours de cérémonies officielles.

Les temples bouddhistes ont leur entrée marquée par une imposante porte en bois sculptée, baptisée -mon. De part et d'autre du passage, 2 grandes statues au regard courroucé et à la posture intimidante représentent les gardiens Niô qui protègent le site sacré des démons et des mauvais esprits. Souvent souligné par une poutre au sol, le seuil de la porte doit être enjambé sans poser le pied dessus. Une petite passerelle en bois peut être aménagée pour faciliter l'accès aux personnes âgées et à mobilité réduite.

Kurama-dera (Kyoto), bassin pour les ablutions Chozuya

⛲ La purification rituelle

Juste après l'entrée de l'enceinte spirituelle, les visiteurs sont invités à venir se purifier sous un pavillon baptisé chôzuya ou temizuya (手水舎) et qui abrite un grand bassin en pierre où coule l'eau d'une fontaine souvent décorée d'un dragon. Voici comment y effectuer ses ablutions complètes :

  1. Avec la louche, que l’on prend de la main droite, on vient prendre une grande coupe d’eau que l’on verse un peu sur sa main gauche ;
  2. On change ensuite de main pour venir verser de l’eau sur sa main droite ;
  3. De nouveau, on change de main la louche pour mettre de l’eau dans sa paume de gauche et se rincer la bouche avec. Sans la boire, on recrache de façon discrète l'eau à l’extérieur du bassin ;
  4. Puis, on relave la main gauche car elle a touché la bouche ;
  5. On lève enfin la louche à la verticale afin de rincer le manche pour la personne suivante.

Au quotidien, les Japonais simplifient ce rituel et lavent uniquement leurs mains sans porter l'eau à leur bouche. Depuis la période du Covid 🦠 et pour des raisons d'hygiène, l'étiquette de purification a encore été allégée, ainsi les louches ont été retirées et on se lave juste les mains sans rien manipuler.

Deux points importants à rappeler : l’eau utilisée pour ses ablutions ne doit pas se retrouver dans le bassin commun à débordement qui sert aux autres visiteurs. Il est important de veiller à ce qu'elle soit rejetée en-dehors, vers le sol et les évacuations prévues à cet effet. Par ailleurs, en aucun cas le pavillon chozuya ne sert à boire ou à se ravitailler en eau fraîche. Les distributeurs automatiques de boissons ainsi que les toilettes 🚽 publiques remplissent, eux, très bien cette fonction.

Liée au shintoïsme et donc d'abord présente dans les sanctuaires, la purification par l'eau s'est également étendue dans les temples, au côté de la purification par l'encens et le feu 🔥 propre au bouddhisme.

Devant le hall principal bouddhiste, on trouve un encensoir assez massif où les visiteurs viennent allumer une poignée de bâtons d'encens baptisés senkô (線香) qui coûtent autour de 100¥ (~0,61€) l'unité. On attire sur soi la fumée parfumée, qui aurait entre autres des vertus médicinales, avant d'aller prier. Des bougies à allumer et à poser sur un présentoir dédié, afin d'honorer Bouddha et ses proches décédés, peuvent être parfois présentes également.

Kotoku-in (Kamakura), fidèles en train de prier devant le Daibutsu

🙏🏻 Comment prier les divinités ?

Pour les 2 religions, dans l'acte de prière il ne s'agit pas de faire une demande unilatérale à une divinité mais plutôt une manière de lui rendre hommage, de la respecter ou de la saluer avec l’idée d’obtenir par la suite sa bienveillance. De cette façon, on utilise en japonais le terme sanpai (参拝) que l'on traduit en français par "rendre visite" ou "marquer sa gratitude" pour signifier que l'on va prier au temple ou au sanctuaire.

Les Japonais viennent donc honorer les divinités suivant leur profil et les besoins liés à leur vie quotidienne au travail, en famille ou en amour par exemple. Pour cela, ils se recueillent devant le pavillon de culte haiden (拝殿) qui précède le hall principal honden (本殿) fermé au public dans l'architecture shinto ou, dans les temples bouddhistes, devant le bâtiment principal kondo ou le bâtiment de Bouddha butsuden. Chacun attend son tour puis se place devant la boîte à offrandes pour effectuer les gestes suivants dans un ordre précis.

Au sanctuaire :

  1. On jette d’abord en offrande dans la boîte une pièce de 5¥ (~0,03€) car elle se prononce en japonais go-en et sa signification est la même que les mots "chance", "destin" ou "relation" ;
  2. On secoue doucement 2 à 3 fois la cloche s'il y en a une ;
  3. On s’incline 2 fois, sans trop se pencher non plus ;
  4. On tape 2 fois dans ses mains (voire 4 dans certains sanctuaires dont Izumo Taisha) afin que les kami puissent entendre l'appel ;
  5. On joint ensuite ses mains en prière et l'on exprime un instant sa pensée intérieure sans parler à voix haute ;
  6. On se repenche enfin pour saluer une dernière fois.

Au temple, moins de gestes sont à respecter et seulement l'offrande monétaire, l'inclinaison 2 fois et les mains jointes pour l'hommage silencieux sont nécessaires. Ceux qui souhaitent rester un peu plus longtemps devant le pavillon principal se mettent sur le côté afin de laisser la place aux autres qui attendent derrière soi. Par ailleurs, le clocher des enceintes bouddhistes, hébergé dans une tour de la cloche baptisée shoro, est habituellement réservé à l'usage des moines mais peut être accessible au public à l'occasion de certains évènements.

À noter qu'il n'y a pas d'obligation à effectuer de prière lorsque l'on se rend au temple ou au sanctuaire. En tant que touriste et/ou non-croyant, on peut très bien rester un simple observateur avec une attitude respectueuse.

Hikawa-jinja (Kawagoe), plaquettes votives Ema du sanctuaire

🎋 Faire un vœu et s'attirer la bonne fortune

Une fois le temps de recueillement passé, on se dirige vers le pavillon dédié à la vente d'amulettes de protection. Tenu par une prêtresse miko habillée de rouge et de blanc dans les sanctuaires, et par un moine bouddhiste dans les temples, ce stand propose les mêmes objets de culte traditionnels que l'on retrouve donc partout. Sorte de produits dérivés pour fidèles, ces porte-bonheurs participent aussi financièrement à la vie du personnel et à l'entretien des bâtiments.

Les plaquettes votives ema (絵馬)

Il s’agit de plaquettes votives en bois clair que l'on se procure pour 500¥ (~3,03€) en moyenne. Au verso, on inscrit ou on dessine son souhait, son remerciement ou un but à atteindre. Afin que le message passe auprès des divinités, on suspend la plaquette à côté des autres ema regroupées sur un portant dédié. Chaque site spirituel produit ses propres ema dont le recto joliment illustré souligne les particularités du sanctuaire ou du temple en question, ou encore le signe astrologique chinois de l'année en cours. Pour les touristes étrangers, les ema peuvent devenir des souvenirs à collectionner.

Les prédictions sur papier omikuji (おみくじ)

Ce sont des petits horoscopes sur bandelette de papier que l'on tire au hasard pour environ 100¥ (~0,61€) depuis une grande boîte ou à l’aide de bâtons numérotés qui précisent une case-tiroir à ouvrir. Plusieurs degrés de chance existent et l’on peut obtenir n’importe lequel, c'est-à-dire une prédiction autant positive que négative. On lit ainsi son avenir, parfois assez métaphorique, et détaillé en grandes thématiques : situation amoureuse, argent, santé, voyages, immobilier voire affaires judiciaires en cours, etc. Les sites les plus touristiques proposent des traductions en anglais, mais la plupart du temps les textes des omikuji sont entièrement en japonais.

Les papiers divinatoires négatifs sont à plier en 4 dans le sens de la longueur et à accrocher en faisant un nœud à l'un des fils prévus à cet effet, afin de les laisser derrière soi. Ceux que l'on considère positifs sont emportés chez soi car ils portent chance.

Les talismans décoratifs omamori (お守り)

Ces amulettes en tissu et hautes en couleurs servent à protéger celui ou celle qui les porte contre la malchance, et à lui apporter bonne fortune dans les grands domaines de la vie comme la réussite aux examens, le succès en amour, la prospérité et l'épanouissement au travail. Des omamori bien spécifiques protègent notamment pour un accouchement sans risque ou contre les accidents de voiture 🚙.

Pour un prix moyen compris entre 300 (~1,82€) et 1.000¥ (~6,07€), on achète cette décoration personnelle et bénie par les prêtres que l'on accroche ensuite à son sac, ou bien à un endroit en relation avec ce que l’amulette est censée protéger. Cette petite pochette en joli tissu nouée par un lien ne doit pas être ouverte, autrement la protection se rompt ; elle fonctionne en général 1 année, puis on la renouvelle.

Tsumekiri Fudoson (Shima), comptoir de vente libre d'amulettes Omamori du temple

Les amulettes à exposer ofuda (御札)

Moins connus auprès des voyageurs étrangers, les talismans ofuda se présentent sous la forme d'une haute et étroite plaquette en bois recouverte de papier et sur laquelle est inscrit en kanji le nom du site spirituel ainsi qu'une prière.

Un ofuda coûte en moyenne entre 500 (~3,03€) et 10.000¥ (~60,68€) et s'expose à l'intérieur d'une propriété privée de façon visible : accroché au mur ou suspendu à une fenêtre d'entrée. En effet, il s'agit d'une protection collective pour un foyer ou une entreprise par exemple, à l'inverse de l'omamori qui protège individuellement.

Les poupées daruma (だるま)

Présentes uniquement dans les temples, les figurines daruma représentent le visage de Bodhidharma, le fondateur du Bouddhisme Zen. Les pupilles blanches sont à peindre successivement : lorsque l'on formule un vœu, puis s'il se réalise grâce à la persévérance des efforts déployés.

Enko-ji (Kyoto), contemplation du jardin en automne par les visiteurs du temple

🛐 Peut-on visiter l'intérieur des pavillons ?

Visiter l'intérieur des bâtiments est surtout possible dans les temples qui ouvrent en général leurs portes afin que les visiteurs puissent contempler un jardin intérieur ou bien des décorations intérieures authentiques, comme des peintures sur portes fusuma. Les sites dotés d'un espace semi-ouvert pour la contemplation peuvent également proposer un service à thé matcha 🍵, accompagné d'une pâtisserie traditionnelle de saison.

Pour cela, il faut se déchausser et effectuer la visite en chaussettes 🧦, les plus propres possible par marque de respect. En période estivale, certains sites peuvent autoriser la déambulation pieds nus mais l'on recommande de plutôt prévoir dans son sac une paire à enfiler.

D'une façon générale, l'intérieur des pavillons shinto reste réservé aux prêtres et aucun visiteur ne peut y pénétrer, hormis sur réservation quelques jours spéciaux dans l'année, notamment pendant un matsuri important. Ainsi, on se contente d'admirer le style architectural extérieur des bâtiments et le cadre naturel qui l'accompagne.

Kitano Tenman-gu (Kyoto), prêtes shinto au cours d'une célébration pendant Ume Matsuri le 25 février

🙇🏻 Assister à une cérémonie religieuse

Il n'est pas vraiment possible d'assister à un rituel shinto qui reste le plus souvent un évènement privé, réalisé en petit comité entre les membres d'une famille ou dans le cadre d'une entreprise. En revanche, les pavillons étant souvent ouverts sur l’extérieur, on peut se retrouver à observer en vue arrière une célébration en cours. Le silence reste alors de mise et les photos interdites pour ne pas déranger les participants.

Au sein des plus grands sanctuaires, particulièrement les week-ends, on peut croiser à l'extérieur des couples en kimono traditionnel de mariage qui arrivent ou sortent de leur cérémonie shinto. Les photos sont alors généralement autorisées, même s’il convient bien sûr de ne pas importuner le couple, leurs proches ou le personnel du sanctuaire chargé de leur accueil. De même, les rites de passage d'un âge comme Shichi-go-san donnent l'occasion de voir des familles sur leur 31. Les prêtes shinto peuvent être vus en procession rituelle lors des évènements annuels qui rythment le culte shinto. Le calendrier, qui reste le même d'une année à l'autre, permet d'anticiper sa visite à un moment précis.

Côté temple, on peut se retrouver à assister à des cérémonies bouddhistes qui sont données soit régulièrement à certaines heures, soit pour une occasion précise. Sans faire de bruit, on s'assoit (parfois en position seiza) et on met en silencieux son smartphone 📱 pour écouter les récitations de sutra rythmées au son d'un tambour. Reposant et mystique, ce genre d'expérience vaut les minutes que l'on y accorde mais n'est pas forcément conseillé pour les jeunes enfants.

Une autre occasion peut être de dormir au temple (shukubo) afin d'assister au service bouddhiste du matin qui comprend en général une séance de méditation et un rituel du feu Goma.

Chogosonshi-ji (Shigisan, Nara), rituel Gomagyo au petit matin au Gyokuzo-in

Tolérants envers les religions, les Japonais sont par habitude de grands superstitieux et accordent ainsi une importance à la façon de se comporter dans les temples et les sanctuaires afin de ne pas commettre d'impair, ce qui pourrait déplaire à la divinité consacrée.

Mis à jour le 27 juin 2023 - Good Practices When Visiting Temples and Shrines