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Le jeu vidéo est-il un art ?

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Nota Bene : Cet article a été écrit dans le cadre d'un travail universitaire. Il est ici adapté pour Kanpai! dans la forme, mais le fond n'a pas été modifié.

Introduction

L’architecture, la sculpture, la peinture, la musique, la gravure et le dessin furent considérés comme les arts traditionnels. A ceux-ci ont été ajoutés, au fil du temps et de l’évolution technologique, la photographie, le cinéma, la télévision ou le jeu d’acteur, la bande dessiné et le modélisme ferroviaire ou l’art numérique. Depuis l’arrivée du jeu Pong en 1972, le jeu vidéo 🎮 a lui aussi connu une évolution intéressante. De simples pixels à deux couleurs au départ, il devient aujourd’hui un média au travers duquel le joueur peut vivre toutes sortes d’expériences, dans des mondes d’un réalisme parfois saisissant. En dépassant l’industrie cinématographique en terme de chiffre d’affaire, le jeu vidéo a gagné ses lettres de noblesse auprès des businessmen du monde entier.

Artistiquement parlant la création d’un jeu englobe bon nombre d’arts à part entière. Que cela soit l’architecture, la sculpture, la musique, le dessin, la mise en scène, le jeu d’acteur, ou au contraire des compétences créatrices et du goût pour les réaliser, tout ce qui pourrait être un art, le définir, se retrouve dans un jeu vidéo. A cela s'ajoute une science, qui parfois flirterait bien volontiers avec l'art, à savoir la programmation. Toutefois, le produit final n’est que trop rarement, pour ne pas dire jamais, considéré comme une œuvre d’art. On parlera au mieux d’une œuvre culturelle, au pire d’un vulgaire produit commercial à la mode. Cette absence de reconnaissance a ses causes et se conséquences, que l’on aurait tendance à minimiser et qui pourtant, ont un impact direct sur l’industrie toute entière.

Qu'est-ce que l'art ?

Avant de pouvoir considérer le jeu vidéo comme étant ou non un art, il faut s'attarder sur la définition de l'art. L'encyclopédie internet 📶 Wikipédia le définit comme "toute pratique qui met en œuvre un savoir-faire et une représentation de la nature, des sentiments, du sacré, etc". De nos jours, l'art se veut également quelque chose de principalement esthétique. Une culture du beau qui, dans le cadre du jeu vidéo, a des répercussions assez importante, le support étant intimement lié aux évolutions technologiques. Mais il serait une erreur de cantonner l'art uniquement à la valeur esthétique de l'œuvre. Une œuvre architecturale n'a-t-elle pas comme vocation première d'abriter des gens, avant même d'être belle ?

L'art, le milieu artistique et le jeu vidéo

De plus, si l'art est accessible à tous, il ne semble pourtant qu'à la portée d'une certaine élite. Or le jeu vidéo est avant tout un support populaire. Dès lors, pourquoi ces gens, qui pensent, voir que l'on pense, faire, ou défaire, l'art de nos jours, prendraient en considération un tel média ?

Art visuel

La reconnaissance des milieux artistiques semble donc de prime abord assez compromise. Toutefois, il faut constater que les artistes y voient bien là une occasion d'étendre leur créativité, ou de se faire connaître. Ainsi, l'on ne compte plus le nombre de dessinateurs plus ou moins célèbres ayant prêté leur coup crayon lors de l'élaboration des personnages ou des univers d'un jeu.

L'on retiendra, pour la jeune génération, Akira TORIYAMA, célèbre dessinateur du manga Dragon Ball, qui est également illustrateur de nombreux jeux, tels que la série des Dragon Quest ou Chrono Trigger. L'inverse est parfois possible, comme c'est le cas avec Yoshitaka AMANO, artiste japonais réputé qui s'est principalement fait connaître par ses illustrations de certains jeux de la saga Final Fantasy.

Art musical

La bande son a elle aussi fait intervenir bon nombre de figures connues. Des compositeurs de renom, des chanteurs populaires ou des orchestres symphoniques se sont tour à tour adonnés à créer ou interpréter des créations musicales tout simplement pour un jeu. L’arrivée du CD-ROM comme support de données leur a permis de s’exprimer pleinement, comme s’ils créaient leur musique pour leur propre CD Audio. L’impact sur le joueur est bénéfique, puisqu’une bande son de qualité, admirablement en rapport avec le contexte du jeu, permet une immersion totale. Pour le créateur, outre le fait de faire connaître encore plus son travail, il s’ouvre également au marché florissant (du moins au Japon, en Europe, ce marché démarre timidement) des albums de bandes originales de jeux.

Plus surprenant encore, il arrive parfois que des artistes reprennent la bande son créée pour un jeu et l’interprètent sous forme de concert. C’est le cas par exemple des concerts Final Fantasy, où les thèmes de la série sont repris par des orchestres symphoniques, devant une audience conquise. Une forme de reconnaissance donc du talent des compositeurs de musique de jeu, de la part de l’élite de la musique.

Art scénique

Le cinéma fait aussi les yeux doux au jeu vidéo. À la base simple produit dérivé commercial du succès cinématographique du moment, leur rapport se rééchelonne de plus en plus sur un pied d’égalité. Un exemple flagrant est le cas d’Enter the Matrix (Shiny / Atari, PlayStation 2, Xbox, Gamecube et PC, 2003). Ce jeu, développé par Shiny Entertainment en collaboration directe avec l’équipe du film, s’inscrit directement dans le scénario de la trilogie. Des scènes ont été filmées spécialement pour le jeu, ainsi pour connaître des événements se situant parallèlement à Matrix Reloaded et Matrix Revolution, il faut avoir joué au jeu. Le résultat n'est certes pas à la hauteur, mais le concept mérite d'être salué.

Une autre optique est de faire interagir directement des acteurs célèbres, ou plutôt leur double virtuel, dans les jeux vidéo. Ainsi, Bruce WILLIS aura ouvert le bal en devenant le héros d’Apocalypse (Neversoft Entertainment, Activision, PlayStation, 1998). Pour la première fois dans un jeu non adapté d'un film, un acteur célèbre prêtait sa personne pour interpréter le héros. Plus récemment, l’on retiendra la rencontre de l’acteur japonais Takeshi KANESHIRO et le français Jean RENO dans le sublime Onimusha 3 (Capcom, PlayStation 2, 2004).

Enfin, Hollywood s’est bien sûr intéressé au jeu vidéo pour créer toutes sortes de films dérivés, mais il faut bien avouer qu’ils n’avaient, en dehors des raisons mercantiles, aucune raison d’être. Le plus intéressant restera l’expérience de Square-Enix et son film Final Fantasy. Ecrit et réalisé par les créateurs du jeu, ce film reste la seule véritable tentative d’introduction des talents du jeu vidéo dans le septième art. Malheureusement, les majors hollywoodiennes ont demandé à ce que le scénario soit revu encore et encore, et s’est vidé de sa substance. Le film a misérablement raté sa carrière au box office. C’est donc de manière indépendante que Square-Enix lancera son prochain film, Final Fantasy VII : Advent Children, qui, outre des visuels et une mise en scène ahurissante, devrait on l’espère enfin être le premier chef d’œuvre cinématographique orchestré par des gens du jeu vidéo.

Le jeu vidéo "fashion victime"

Petite anecdote amusante, il est arrivé à plusieurs reprises que des noms de la mode se servent du jeu vidéo dans leur création, lorsqu'il ne s'agit pas de relooker carrément une console. L'utilisation toutefois anecdotique du jeu vidéo par ce milieu créatif ne peut vraiment être considéré comme une réelle reconnaissance.

Les impératifs commerciaux

Un ménage coûteux

Cette effervescence entre les milieux artistiques et l'industrie du jeu vidéo, si elle est bénéfique, ne s'applique cependant de loin pas à l'ensemble des productions. Car il y a un tout petit malaise. Un jeu vidéo coûte cher, très cher à produire. Comptez en moyenne 500'000 Euros pour une production. Et les jeux dont la production dépasse le million sont de plus en plus courants. Dès lors, s'assurer les services d'un artiste de renom pour l'image, d'un orchestre philharmonique pour la bande son et d'un grand réalisateur de cinéma pour la mise en scène engendre un surcoût que tous ne peuvent supporter. Il faut donc se rabattre sur les talents internes, souvent méconnus, mais également diablement efficace.

Car ce sont finalement eux qui ont créée les plus belles œuvres. Certes, sans le talent d'illustrateur d'AMANO, et les délicieuses partitions de Nobuo UEMATSU (compositeur japonais célèbre travaillant de manière libre sur les Final Fantasy), Final Fantasy ne serait peut-être pas devenu l'une des séries de jeux les plus prestigieuses du marché. Toutefois, l'histoire, le code, eux sont bien réalisés par des gens que personne ne soupçonne d'être artistes et qui pourtant, savent émouvoir comme les meilleurs scénaristes du monde.

Beaucoup de talents, peu de moyens

Cependant, eux aussi, pour s'exprimer, réclament qu'on leur en donne les moyens. Et aujourd'hui, l'industrie est dans une phase d'autodestruction créative. Compte tenu de l'ampleur des coûts de développements, les éditeurs deviennent de plus en plus frileux, pour ce qui est de prendre des risques sur une œuvre artistique.

Le cas Electronic Arts

Le numéro un mondial du jeu vidéo, Electronic Arts, le démontre chaque jour. L'entreprise a basé sa fortune sur la réédition annuelle de leur gamme de jeux de sports. Elle ne diversifie que peu son offre, mais vient avec des titres dont l'impact sur les consommateurs de base doit être fort, le tout à grand renfort de licences (FIFA, NBA, NFL, NHL, etc.). Cette logique, du jeu vendeur vite fait pas toujours bien fait est adoptée également par bon nombre d'acteurs majeurs de cette industrie. D'autres fonctionnent en réaction à ce que font leurs concurrents. Un jeu surprend tout le monde en réalisant une bonne performance sur le marché ? Attendez-vous à voir arriver pléthore de clones bons marché dans les semaines qui suivent.

Car il faut se rendre à l'évidence. Comme pour la musique, comme pour la peinture, comme pour le cinéma, il y a les personnes qui consomment ce qu'on leur vend, et il y a celles qui vont plus loin que ceci. Qui cherchent la perle rare. Et le public des œuvres mercantiles est beaucoup plus large, beaucoup moins critique et donc une cible privilégiée. Dès lors, les budgets qui pourraient être alloués à des projets ambitieux, innovants, artistiques, sont souvent retenus pour des jeux vites consommés, vite oubliés. Et l'image de l'industrie toute entière en prend, bien évidemment, un coup.

Ubisoft, le grand artiste français

Derrière ces manager qui n'ont jamais eu de manette entre les mains de leur vie, et leur philosophie du cash à court terme, se cachent heureusement des éditeurs, beaucoup plus soucieux de la qualité de leurs titres. Le petit français Ubisoft en est l'un des plus beaux exemples, à l'heure actuelle. En 2003, ils ont pris le pari osé de ressusciter la franchise Prince of Persia avec The Sands of Time (PlayStation 2, Xbox, Gamecube et PC, 2003) et on également mis sur le marché Beyond Good & Evil (PlayStation 2, Xbox, Gamecube et PC, 2003), une production artistique 100% française.

Malheureusement, ce dernier, malgré un accueil unanimement positif de la critique, n'a pas su trouver son public. Et la menace plane sur l'éditeur français, puisque le géant du jeu vidéo uniforme, Electronic Arts, a hostilement racheté 20% de son capital. Une opération qui, si elle venait à s'étendre à d'autres part du capital, pourrait avoir un impact direct sur le capital créatif d'Ubisoft.

Concentrations, fusions, rachats, faillites

Le rachat partiel d'Ubisoft par Electronic Arts n'est pas un cas isolé. L'industrie toute entière doit faire face aux augmentations constantes des coûts de développement, et l'on a ainsi vu de nombreuses opérations financières entre éditeurs. La plus grosse et la plus frappante est sans aucun doute celle de Squaresoft et Enix, les deux géants japonais du jeu de rôle qui, malgré une santé financière relativement honorable (quoique difficile pour Squaresoft, après l'échec du film Final Fantasy), ont décidé de se regrouper pour pouvoir conserver leur niveau d'excellence. Cependant, si ce regroupement se fait avant tout pour conserver un certain niveau de qualité dans les jeux, d'autres se font pour des raisons beaucoup plus hostiles et discutables.

La priorité est donnée à l'achat de nouvelles propriétés intellectuelles qui font vendre, puis à les exploiter au maximum sans les renouveler. En d'autres termes, prendre une œuvre d'art, la photocopier, vendre les photocopies, puis la laisser tomber quand tous les gens seront lassés de l'avoir vue et revue.

L'exode des artistes

Dans ce contexte difficile, de nombreux artistes n'hésitent plus à claquer la porte de leur éditeur et se mettre à leur compte.

Ce fut le cas entre autres de Tetsuya MIZUGUCHI. Ce game designer de chez Sega s'est fait connaître au travers du jeu Sega Rally, un jeu de course du milieu de années 1990 très populaire dans les salles de jeu. Après avoir fait ses preuves, il avait créé une équipe de développement au sein même de Sega, nommée United Game Artists (UGA). Cette équipe réalisa deux titres phares pourtant méconnus du grand public, Rez (Dreamcast, PlayStation 2, 2001) et Space Channel 5 (Dreamcast, PlayStation 2, 2001). Rez était un concept intéressant, dans lequel les actions du joueur avaient une répercussion directe sur la musique du jeu. Ainsi, chaque joueur avait en quelque sorte sa musique. Space Channel 5 quant à lui mettant en scène une sorte de comédie musicale interactive délirante et très stylée.

Ces deux jeux n'ont toutefois pas séduit le grand public, peut-être car trop originaux, et Sega pris la décision de fusionner UGA avec une autre de leurs équipes internes. Se voyant pieds et poings liés, à réaliser des jeux de commandes par l'éditeur, MIZUGUCHI a quitté Sega et fondé sa propre société, Q Entertainment. Il a pris des risques, mais aujourd'hui, il vit de son art, sans frustration. L'histoire ne dit toutefois pas encore si cette aventure durera ou pas.

Départs en série

D'autres artistes ont suivi cette tendance, tels que Shinji OKAMOTO (créateur du légendaire jeu de combat Street Fighter), Hironobu SAKAGUCHI (le "Monsieur Final Fantasy") ou Jason RUBIN (le papa de Crash Bandicoot). En s'affranchissant des grandes multinationales du jeu, et s'associant à de petits éditeurs qui respectent encore la création artistique dans ce milieu, ils représentent une nouvelle vague qui pourrait bien changer la donne sur la perception artistique du jeu vidéo.

Fonds d'aide à la création

Afin d'aider ces jeunes pousses, des fonds commencent à être créés. C'est ce qu'a fait Hiroshi YAMAUCHI, le richissime ex-PDG de Nintendo. En revendant une partie de ses actions Nintendo à la société, il a constitué un fond, le "Fund Q", destiné à encourager les jeunes studios à réaliser leurs idées. Cette manne financière se monnaie ensuite contre l'exclusivité de ces titres sur consoles Nintendo, mais il faut admettre que cela ouvre des perspectives intéressantes à tous les jeunes développeurs. Ce genre d'initiative est cependant encore bien trop rare.

La course à la technologie

Toujours plus beau, toujours plus cher

L'on ne peut parler de jeu vidéo sans évoquer l'aspect technologique. Car les œuvres dépendent directement de ceci. Plus les consoles ou ordinateurs sont puissants, plus les possibilités créatives sont immenses. Et plus les coûts pour les exprimer sont élevés, donc plus il est difficile de les exploiter. Un paradoxe qui semble sans issu, tant que les machines puissantes resteront des casse-tête pour les programmeurs. Car à chaque génération de machines, il faut des développeurs capables de programmer nettement plus de choses, et ces compétences se monnaient cher.

L'idéal serait que les kits de développement viennent directement agrémentés de routines préfabriquées afin d'alléger ce procédé, et laisser plus de marge au processus créatif. Cependant, cela pourrait aussi donner une certaine uniformité dans le rendu final des jeux. Deux maisons construites avec les mêmes briques ne seront peut-être pas pareilles, mais auront toujours un air de famille. Et cela n'est sans doute pas souhaitable pour des artistes.

Et si le fond primait sur la forme ?

L'autre point de vue, souvent adopté par Nintendo, est de mettre de côté la technologie de pointe, utiliser de manière satisfaisante la technologie actuelle et se concentrer sur le contenu. C'est ce qu'ils ont réalisé avec The Legend of Zelda : The Wind Waker. S'il n'impressionne pas visuellement, son style dessin animé est profondément attachant et le système de jeu si bien conçu, qu'il laisse le joueur scotché à son écran, sans forcément lui en mettre plein les yeux.

Le jeu vidéo, un art périssable…

Enfin, la dépendance du jeu à la technologie de son support fait que le jeu vidéo est éphémère. Chaque génération enterre en terme de son et d'image la génération précédente. Dès lors, comment considérer quelque chose comme de l'art, si 10 ans plus tard, les gens vous diront que finalement, c'était très laid. Bien sûr, ce jugement ne tient que si l'on considère l'art comme quelque chose de fondamentalement esthétique. Un jeu qui dans son histoire et son fonctionnement est excellent le restera éternellement, même si son aspect visuel et sonore vieillira certainement.

La différence : l'immersion

Outre le fait que le jeu vidéo intègre en son sein, comme décrit en introduction, bon nombre d'arts, il a une caractéristique qui lui est propre : l'immersion. Lorsque l'on regarde un film, écoute une musique, admire un tableau, on peut ressentir des émotions, se laisser transporter quelque part par ce que l'artiste veut nous transmettre. Tout ceci dans une certaine limite. Un film ne nous permet pas de nous arrêter, de regarder une scène sous tous ses angles, explorer les lieux. Ou du moins seulement dans la limite de temps imposée par le réalisateur. Le jeu vidéo, lui, le permet. Dans son jeu The Legend of Zelda : Ocarina of Time (Nintendo, Nintendo 64, 1998), Shigeru MIYAMOTO (Game Designer de génie au service de Nintendo, créateur, entre autres, de Super Mario et Donkey Kong), offrait un univers cohérent, enchanteur, dans lequel le joueur avait une quête à réaliser, mais pouvait également l'oublier se concentrer sur d'autres choses. Le joueur y faisait l'aventure selon son gré, immergé dans ce monde où tout était si bien rendu que chaque événement apportait ses émotions. En ce sens là, ce jeu pourrait être considéré comme une œuvre d'art, car il offrait quelque chose d'unique, de fort, que nul autre support n'aurait pu faire connaître.

Le créateur artiste

La star

De nombreux noms ont été évoqués. Pourtant, personne ne les reconnaîtra vraiment comme artistes. Seules quelques grandes figures du jeu vidéo sont aujourd'hui reconnues et respectées en tant qu'artistes. Comme Shigeru MIYAMOTO, que beaucoup considèrent comme le Steven SPIELBERG ou le Georges LUCAS du jeu vidéo. Il faut dire que cet homme est presque à lui seul responsable de la forte position de Nintendo dans le domaine du jeu vidéo. Plus qu'un personnage symbole d'une marque, avec Mario, il a créé le symbole de toute une industrie.

The Walk of Game

La reconnaissance des artistes fait son petit bonhomme de chemin toutefois. Comme pour le cinéma, un "Walk of Game" a même été créé à San Francisco, dans le centre Metreon. Les deux premiers créateurs à y figurer sont bien évidemment Messieurs Shigeru MIYAMOTO, et Nolan BUSHNELL, tous deux pour l'ensemble de leur carrière. Nolan BUSHNELL, fondateur d'Atari, est considéré par beaucoup comme l'un des pères de l'industrie du jeu vidéo. Des personnages de jeu y font également leur apparition, comme Mario, Link (le héros de The Legend of Zelda), Sonic (la mascotte de Sega) ou Master Chief (du jeu Halo, un jeu de tir très populaire aux Etats-Unis). Cependant, si cette initiative est louable, elle n'est pas non plus totalement désintéressée. Le centre commercial Metreon appartenant à Sony, leader actuel du marché du jeu vidéo.

Un travail d'équipe

Toutefois, si les noms d'artistes du jeu vidéo peinent à venir dans les esprits, c'est aussi car le jeu vidéo est avant tout un travail d'équipe. Dès lors, il n'est pas toujours bien vu qu'une seule personne s'approprie le travail de toute une équipe. Et en ce sens là, s'il fallait que tout le monde soit reconnu en tant qu'artiste, la liste des artistes reconnus ferait plus que doubler.

Le joueur artiste

Le jeu vidéo est art en manque de reconnaissance, les créateurs sont des artistes frustrés de ne pas connaître gloire, ne reste que le joueur. Le joueur peut-il devenir un artiste ? Si maîtriser parfaitement certains jeux entre presque dans le domaine de l'art, il faut bien reconnaître une chose. Le jeu vidéo est, d'une manière générale, programmé avec un début, un milieu, et une fin. La manière de joindre les bouts peut certes varier du tout au tout d'un jeu à l'autre et d'un joueur à l'autre. Mais si l'illusion de liberté, artistiquement simulée par les développeurs, est bien présente, elle laisse toutefois le joueur dans un univers fait de règles précises. Dès lors, il ne fait qu'exploiter un instrument dans un cadre de règles prédéfinies et ainsi, on le verrait plus comme un footballeur qui exploite un ballon selon les règles du football, qu'un véritable artiste.

Conclusion

Contexte économique difficile

Le contexte économique incite le public à prendre le jeu vidéo comme un objet de consommation froid et sans âme. Ainsi le jeu vidéo ne passe pas réellement comme un art auprès du grand public. Dans cette logique mercantile, dur de faire ressortir les œuvres d'auteurs.

Cependant, il faut reconnaître que la musique ou le cinéma connaissent le même traitement. Le jeu vidéo est un moyen d'expression comme un autre, libre ensuite aux auteurs d'en faire une œuvre d'art, ou un fade produit commercial.

Rôle des médias

Cependant, faire distinguer, lorsqu'elles ont la chance de sortir, les œuvres d'art du jeu vidéo est une tâche importante, si le média veut un jour s'imposer en tant qu'art. Que la presse spécialisée encense un Beyond Good & Evil est une bonne chose. Mais la presse spécialisé s'adressant avant tout à un public déjà relativement averti, est-ce bien nécessaire ? Ne faudrait-il pas que les médias généralistes que sont la presse quotidienne et la télévision apportent un peu plus de crédit au jeu vidéo ? Car tant qu'il restera confiné à un public de passionné, le grand public restera frileux à investir une petite centaine de francs dans un produit "qui a l'air bien, mais qui ne sera pas acheté car il ne ressemble pas à quelque chose qu'ils connaissent". Un véritable effort est donc à fournir de ce côté-là, bien que l'on s'enfonce dans un paradoxe. Ces médias ont besoin que le jeu vidéo soit reconnu pour en parler, et le jeu vidéo a besoin de ces médias pour être reconnu.

Aide des fortunes du jeu vidéo

D'un point de vue des développeurs, ou plus particulièrement des éditeurs, il est impératif que l'exemple du "Fund Q" initié par Monsieur Hiroshi YAMAUCHI soit suivi. Des entreprises comme Electronic Arts, qui dégagent beaucoup des centaines de millions de dollars chaque année pourraient mettre à disposition un fond, ou créer un label qui encourage les artistes du jeu à exprimer leurs idées.

Le risque doit être pris

Bien sûr, le risque financier est et restera éternellement au cœur du problème. Cette industrie doit voir à long terme. En proposant toujours les mêmes concepts, qu'ils soient juste plus beau ou juste un peu différents, tôt ou tard, ils lasseront le joueur. En étouffant la création artistique, au profit de la création commerciale, ils la détruisent à petit feu 🔥 tout en se détruisant. Il est clair qu'il est facile de juger lorsque l'on n'a pas à sortir 500'000 Euros pour un jeu dont on ne sait pas s'il sera amorti. Mais un peu de risque ne fera pas de mal à cette industrie.

Heureusement, de nombreux créateurs commencent à se réveiller et à tenter le coup. Les départs des artistes vont à n'en pas douter s'intensifier ces prochaines années, et il faut reconnaître que la solution est là, et nulle part ailleurs. Il faut que les artistes s'expriment, et s'ils s'expriment bien, on les entendra et cette reconnaissance leur sera accordée.

Mis à jour le 28 août 2015 -